Table des matières
Dans le cadre du travail sur le réseau protestant nous en sommes arrivés à une étape délicate : formuler une charte.
Dans ce qui suit, quelques réflexions personnelles sur ce processus.
Pourquoi la charte ?
Poser une charte c’est poser des limites. Ces limites n’ont pas comme but premier d’exclure ou d’inclure, mais de structurer un espace de jeu et de relation.
Elle donne aussi l’occasion de prendre position : est-ce que c’est un jeu dont je souhaite faire partie ?
Le risque de l’absence de charte est d’être dans un rapport d’immédiateté les uns avec les autres qui ne fait pas d’emblée la place à un exercice de la responsabilité personnelle.
Sans charte il ne reste que le jeu inconscient des non-dits qui structure des identités implicites et névrosées, en constant conflit les unes avec les autres dans la lutte pour leur existence.
Dans cette perspective, le but de la charte est fortement lié au sens du jeu que l’on veut jouer.
Les objectifs de « Réseau Protestant »
Ceux-ci sont résumés au début de la charte.
Le réseau protestant rassemble et valorise les différentes présences web pertinentes du monde protestant réformé romand dans un esprit élastique et stimulant.
Réseau Protestant
L’idée directrice est d’offrir un site qui permette de faire du lien et qui favorise la création de liens. Cela partait d’une initiative de Nicolas Friedl et Marc Pernot, sans lesquels ce projet ne se serait jamais lancé. Cette idée de « faire du lien » est aussi en grande partie à l’oeuvre derrière mon activité sur ce blog.
Il y a un sens ecclésial et théologique à ces objectifs. Le protestantisme réformé se trouve devant le défi de sa propre cohérence, de sa capacité de cohésion et de présence au monde. Cela implique une épreuve. Internet est l’un des lieux où cette épreuve se déroule.
Réseau-Protestant est une tentative de se mettre à l’épreuve dans ce défi. Ce n’est pas une initiative qui vient des organes de la direction institutionnelle. Ce sont des acteurs du web protestant qui se sont dit que ce défi valait la peine d’être engagé.
À préciser cependant que les personnes derrière réseau-protestant restent quand même des employés des institutions protestantes traditionnelles de Suisse romande.
J’évoquais le sens théologique de la démarche : si on essaie de répondre aux objectifs qui guident cette charte, on va inévitablement se retrouver confronté à une délimitation. Qu’est-ce qui délimite la sphère « protestante » ?
L’identité protestante
En Suisse romande, cette question est épineuse. Qu’est-ce que c’est que d’être protestant, si cela ne veut plus dire « être la majorité »? – cette question se pose en tout cas pour les canton de Neuchâtel, Vaud, Genève et Berne (dans une certaine mesure).
- Est-on protestant·e parce qu’on est inscrit au registre en tant que « protestant » ?
- Peut-on être « protestant·e » sans le dire ?
- Est-ce que seul les pratiquants sont « protestants·es »?
- N’est-on pas plutôt « réformé·e » que « protestant·e » ?
- Les « évangéliques » qui se revendiquent « protestants·es » ou « réformés·es » sont-ils réellement protestants·es ou réformés·es ?
- Est-ce que « protestant·e » ne veut pas dire « libéral·e » ? ou est-ce qu’il faut dire « réformé·e » pour dire « libéral·e »?
- Le·la « protestant·e » n’existerait-iel pas ?
À mon sens, il ne s’agit pas de répondre à cette question par une définition. A priori, je ne sais pas ce que cela veut dire que d’être « protestant·e ». Il s’agit d’une identité ouverte.
Être protestant·e, tel que je le comprends, c’est être dans une « protestation évangélique« . C’est être cellui qui refuse tout autre identité que celle qui lui est donnée dans la Bonne Nouvelle que Dieu adresse au monde en Jésus-Christ. Ce n’est pas une identité que l’on possède et sur laquelle on peut mettre le grappin.
C’est pour cela que mettre Jn 13,34 en exergue me semble important.
Je vous donne un commandement nouveau : aimez-vous les uns les autres. Il faut que vous vous aimiez les uns les autres comme je vous ai aimés.
Nouvelle Français Courant
La référence à ce verset invite à un discernement constant sur la qualité du jeu qui se joue pour ceux qui ont accepté d’y jouer. Il n’y aura pas de réponse toute faite sur « qui est protestant·e » en dehors de l’espace indiqué par ce commandement.
Néanmoins, cela ne fait pas l’économie d’une incarnation et d’assumer une personnalité circonscrite. C’est ce que la charte provoque lorsqu’elle assume la relation aux institutions de la Conférence des Eglises Réformées Romandes.
Theologeek relève d’ailleurs qu’il serait sans doute plus pertinent de parlé de « réseau réformé ». Le point est à méditer ! La CER n’est pas le réseau évangélique Suisse, ni la communion anglicane, etc. Mais peut-être faut-il rêver plus large ? La « Réforme » est une réalité de toute Eglise, voire de toute tradition religieuse.
La charte comme jeu ouvert
La charte, comme toute écriture, n’est pas close. Elle est appelée à évoluer et à être reformulée – selon un rythme encore à définir.
Elle offre une personnalité en construction. Il reste encore à voir laquelle ce sera! Cette personnalité sera composée de ceux qui acceptent de jouer au jeu qu’offre la charte et de ceux qui souhaitent s’y joindre.
L’une des closes d’engagement pour jouer le jeu du réseau est la publication de la liste sur son propre site internet. Mais cela s’arrête plus ou moins là : cela équivaut à dire « ok, je suis d’accord de jouer ». Au poker : « je suis« .
Il y aura toute une série de sites qui, pour différentes raisons, ne joueront pas ce jeu. Sont-ils ou ne sont-ils pas protestants ? La charte de « réseau-protestant » n’implique pas de répondre à cette question.
Il y a dans tous les cas l’espérance de contribuer à la personnalité de ceux qui se revendiquent de la « protestation évangélique » en Suisse Romande.
Ces réflexions n’engagent que l’auteur de ces lignes et non pas les autres acteurs de réseau-protestant.ch !
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